Vendredi passé c’était au tour du PLQ de lancer sa stratégie pour le développement du Saint-Laurent. Aucun doute, le Saint-Laurent et développement économique seront devenus des synonymes, du moins pour la durée de la campagne électorale. C’est à l’industrie touristique de s’assurer qu’à la fermeture des bureaux de scrutins le 7 avril que ce sera toujours le cas.
PQ, CAQ et PLQ ont fait connaître leur stratégie sur le sujet. Je suis bien curieux de connaître la position de Québec solidaire (QS) alors que, pour la première fois, le parti a un autocar de campagne qui leur permettra de sortir des limites du Plateau Mont-Royal pour sillonner les rives…du Saint-Laurent.
Une stratégie maritime pour le Québec, version PLQ
Le titre de l’ouvrage : Une stratégie maritime pour le Québec. Pour remettre le Québec en marche 2014-2030. Un titre approprié pour un fleuve que les Amérindiens surnommaient, bien avant l’arrivée des premiers Européens, la « Rivière qui marche ». Les auteurs de la stratégie affirment dès les premières pages qu’il s’agit de la première stratégie maritime de l’histoire du Québec. Le ton est donné.
Les trois partis ont fait leur devoir. Tout n’est pas parfait, mais dès le moment qu’une stratégie est lancée publiquement, cela permet d’ouvrir le débat et d’amorcer une réflexion afin d’enrichir celle-ci. L’objectif étant une stratégie, qui réponde aux besoins des citoyens et des entreprises.
La stratégie
Dans leur Stratégie maritime, les libéraux annoncent la création de 30 000 nouveaux emplois. Celle-ci génèrera des investissements privés de plus de 4 milliards de dollars et s’accompagnera de retombées fiscales supérieures à 3,5 milliards de dollars.
Selon le PLQ « le Saint-Laurent, offre au Québec de nouvelles occasions uniques de développement économique ». Parmi ces nouvelles occasions, le tourisme de croisière est identifié à cause de sa forte hausse dans le monde.
C’est d’ailleurs l’occasion, pour les libéraux de rappeler à juste titre, que c’est leur gouvernement qui a lancé la Stratégie sur les croisières internationales (2008) et qui a suivi une des recommandations du Rapport Rozon (2011) en incluant dans le Plan de développement de l’industrie touristique 2012-2020 (PDIT) la recommandation de faire du Saint-Laurent une icône du Québec touristique.
Il est aussi de bon aloi de souligner que le gouvernement de Madame Marois a eu la présence d’esprit de prendre la balle au bond en poursuivant ces stratégies.Un ministre délégué pour 11 axes d’interventions
Pour assurer la mise en œuvre de sa stratégie, le PLQ prévoit nommer un ministre délégué à la Stratégie maritime. Pour un dossier de cette complexité où une multitude d’acteurs économiques seront appelés à jouer un rôle, dont le fédéral qui occupe un vaste champ d’interventions, cela peut se justifier.
Cinq axes de la stratégie ne s’appliquent pas au tourisme ou du moins pas directement. Cinq autres axes ont des impacts directs ou indirects sur le tourisme et d’autres secteurs d’activités économiques, j’inclurais dans cette catégorie :
- La priorité accordée au transport maritime qui met l’accent sur la mise à jour des infrastructures afin de répondre à la demande des différents marchés (dont les croisières avec plus de 110 000 croisiéristes) et des différentes administrations portuaires;
- La préservation des ports et des quais;
- L’amélioration du service des traversiers (5,6 millions d’usagers);
- Le transport plus sécuritaire et écologique des marchandises, qui inclut la mise en réserve de 10 % du territoire marin pour des aires marines protégées d’ici 2015, tout en créant un « Fonds environnement maritime » qui serait consacré à la recherche environnementale et à la conservation du fleuve;
- La formation continue des travailleurs maritimes expérimentés et favorisera leur intégration dans des métiers connexes (tourisme et autres) lorsqu’ils décideront de quitter leur emploi en mer.
Le tourisme dans tout ça? Une recette qui n’est pas à point!
Commençons par deux mauvaises idées :
- La création d’un comité interministériel permanent sur le transport-tourisme-région qui aura pour mandat de faire la promotion d’activités marines auprès des touristes québécois et étrangers.
Un comité interministériel pourquoi pas? Mais pas pour faire de la promotion. Comme s’il n’y avait pas assez de joueurs dans ce créneau.
- La mise sur pied d’un Bureau de l’offre touristique maritime qui permettra de créer des partenariats d’offres touristiques public/privé et/ou privé/privé, tout en offrant un soutien gouvernemental aux institutions publiques et aux organisations privées.
Là aussi cela sent le dédoublement. L’idée semble intéressante, mais si elle devait voir le jour, pourquoi cela ne se ferait pas au sein d’une entité qui existe déjà?
La stratégie maritime du PLQ en matière touristique a aussi plusieurs éléments intéressants, dont :
- Le développement de l’industrie des croisières d’excursions et fluviales qui se ferait avec une stratégie complémentaire à celle des croisières internationales;
- La mise en place d’un crédit d’impôt pour la rénovation ou le remplacement des navires;
- L’amélioration des infrastructures d’accueil, entre autres les débarcadères.
Et d’autres actions qui mériteraient d’être clarifiées comme celles :
- D’assurer un soutien aux pêcheurs et mariculteurs dans le démarrage ou l’amélioration de la qualité de l’offre de pêche touristique.
Cela me semble intéressant, mais qu’en est-il au juste?
- D’examiner les scénarios de mise en marché globale et intégrée du tourisme régional du terroir.
Je suis pour, mais voilà un vaste domaine d’intervention.
- D’analyser les possibilités de tourisme maritime concerté par les associations touristiques régionales (ATR) avec, entre autres, le milieu culturel, les produits du terroir et les festivals et événements, pêcheurs et entreprises gravitant autour du milieu des pêcheries afin de développer le tourisme de destination.
D’accord! Mais bien qu’il ne faille pas s’attendre dans ce type de document a beaucoup de précisions, certaines parties de celui-ci devraient être plus explicites.
- Faire la promotion d’activités rattachées au tourisme maritime au nord du 49e parallèle, dans le cadre de la relance du Plan Nord.
Où était l’équipe économique du PLQ?
Le document mentionne la création de 30 000 emplois de 2015 à 2030, dont 2 000 pour le secteur touristique. Est-ce réaliste, suffisant ou insuffisant, difficile de se prononcer? Mais bien que tous les gouvernements, quels qu’ils soient, fassent ce type de prévision, je suis toujours étonné de voir une projection sur une si longue période.
La répartition des investissements de la stratégie est trop sommaire et manque de clarté. Quelle part revient exactement au tourisme?
La stratégie maritime du PLQ
Malgré ces critiques, la stratégie maritime des libéraux offre plusieurs angles de développement originaux et complémentaires. Toutefois, le volet touristique de la stratégie aurait dû mériter plus d’attentions, surtout de la part d’un parti qui est à l’origine de la stratégie du développement des croisières internationales et de la volonté de faire du Saint-Laurent une icône touristique internationale.
Un ouvrage fut publié vers la fin des années 70 (la préhistoire pour certain) sous le titre «Le tourisme en péril». L’auteur Jacques Demers (pas le sénateur, un autre Demers) où il était fait état que la multitude des intervenants ou simili intervenants freine le développement…l’histoire se répète. En passant, le St-Laurent est un axe touristique depuis 200 ans
Nelson,
J’ai lu l’ouvrage de M. Demers quand j’étais au Bac en tourisme à l’UQAM (84-87). Je crois que je vais en refaire la lecture. D’accord avec toi à propos du Saint-Laurent, je dirais même que le fleuve est un axe touristique (tourisme d’affaires ;-)) depuis les Basques. Jacques-Cartier en 1534 est aussi venu, mais de touristes, certains de ses matelots sont devenus les premiers immigrants sur une terre qui était déjà habitée par les Amérindiens 😉 Depuis, l’histoire s’est répétée des milliers de fois.
Bonjour Louis!
C’est bizarre qu’un parti se disant prêt à gérer le budget de façon rigoureuse n’ait pas de problème a parler de promotion de tourisme maritime au nord du 49e parallèle dans le cadre du Plan Nord. Bien qu’il n’y ait aucun montant d’indiquer, les retombées d’une telle sorte de tourisme ne me semble pas être distinguable à court, moyen ou long terme étant donné que les infrastructures d’accueils comportent bien souvent de grandes lacunes. Bien sûr j’ai peut-être tord, car je n’ai jamais étudié la question. Si c’est le cas j’aimerais que quelqu’un de plus calé me reprenne! Toutefois, ça sonne comme s’ils n’ont aucun problème a lancer de l’argent en l’air pour justifier le Plan Nord, sans toutefois avoir d’idée des retombés d’une telle sorte de tourisme. Ça sonne familier…
D’un autre côté, ils mentionnent vouloir »examiner les scénarios de mise en marché globale et intégrée du tourisme régional du terroir ». Il s’agit d’un sujet que je trouve important et qui est chère pour bien des personnes dans les région. Encore là, c’est beau parler d’examiner, mais je vous rejoint à savoir que c’est un sujet beaucoup trop large et regroupant trop d’acteurs sur un pan de territoire encore plus important.
Finalement, un petit mot sur les retombés. Je trouve que 2 000 emplois touristique sur 15 ans c’est bien peu (133 par année) si l’on considère une telle prévision comme faisable. De plus, qu’est-ce qui est touristique et qu’est-ce qui ne l’ai pas? Pour une industrie touristique aussi large que la notre, ça me semble très bas. J’ai donc de la difficulté à comprendre les tenants et aboutissants de leur calcul et ça me laisse perplexe quant à leur équipe économique. Est-ce qu’ils sous-estiment dans le but d’atteindre facilement les objectifs? Est-ce que miser bas est une bonne idée dans le cadre d’une stratégie gouvernementale? Personnellement, je ne pense pas…
J’ai hâte de lire votre prochaine chronique, car Mme Marois a parlé plus tôt aujourd’hui de la stratégie touristique du PQ. Je n’ai pas été étonné des éléments mentionnés, sauf au sujet du St-Laurent, qui fût évité comme s’ils ne voulaient pas être associés aux deux autres partis! J’imagine qu’il n’y a pas 1000 manières différentes de parler de la relance du St-Laurent, en lien avec le Plan de Développement de l’Industrie Touristique.
Gabriel, très bonne analyse et excellentes questions. J’ai la même interrogation en ce qui a trait aux actions au nord du 49e parallèle. L’ATR de la baie James devrait être en mesure de donner un point de vue éclairé sur le sujet. Toutefois, parfois des engagements politiques reposent sur une argumentation peu détaillée où les enjeux stratégiques prennent le dessus des réelles retombées économiques.
Pour le nombre d’emplois (2 000) j’avais fait le même calcul (133/an). 2 000, 4 000 ou 10 000, peu importe, ce n’est pas crédible. Comme mentionné dans mon article je suis toujours surpris de retrouver ce type d’estimation sur une aussi longue période.
Pour les annonces à caractères touristiques de Mme Marois, je crois que son silence sur la Stratégie Saint-Laurent peut s’expliquer par le fait que l’annonce faite par M. Bérubé date d’à peine 2 semaines et que la Mme Marois attend sûrement un moment plus propice, peut-être en compagnie de Pascal Bérubé dans une région qui longe le Saint-Laurent.
Merci pour ton commentaire